Peinture laquée sur papier
76 x 57 cm
Enamel paint on paper
29.92 x 22.44 in.
Galerie Anne de Villepoix, Paris
Acquis directement auprès de cette dernière par l'actuel propriétaire
"Mon père faisait plein de choses, des jouets et des poupées pour mon frère et moi; il était comme un artiste outsider. Ma mère pensait que l'art était sale- tu salis la maison (semblait-elle dire)."
Joyce Pensato
FR
Dans les années 1990, l'arrivée à Paris de Joyce Pensato était toujours annoncée comme une sorte de tornade grunge. Installée chez Anne de Villepoix (qui fut d'ailleurs la première à la montrer) elle partait à la galerie avec ses figures grimaçantes croisant Mickey Mouse, Felix le Chat, Homer Simpson ou [This is Not] Groucho Marx en passant par Batman ou Donald Duck. Quitte à les refaire sur place.
Pour Pensato, ces figures de la culture populaire et des films d'animation n'ont jamais constitué, comme il est supposé du pop art américain canonique, une façon de se distancer du monde de la gestualité. Au contraire, ça a plutôt été une façon de mélanger les deux, avec un esprit rebelle et corrosif. Son truc à elle, a plus été de faire mal aux deux. Sa technique a consisté à faire dériver avec force coulures, effacements et auréoles pas très nettes, les "mouvements du bras et de l'épaule" exécutés en peinture par une Joan Mitchell (que Joyce Pensato a bien connu) ou un Franz Kline; en d'autres termes, à mettre le corps au service du tracé des créatures des comics et des dessins animés américains, mais pour les altérer, pour mieux les faire "rentrer" de force dans l'épaisseur du papier, de la toile, du mur.
Avec Joyce Pensato, on a toujours eu le sentiment que la frénésie apparaissant sur ses tableaux et ses dessins, faits d'une accumulation linéaire de couches et de retraits de peinture à l'émail sombre et blanc (plus récemment la couleur), s'épanchant en quelque sorte dans les tentatives d'effacement refaites et refaites, englobait sa personne. On pourrait tout aussi bien dire le contraire, que Joyce Pensato était [dans] ses tableaux et ses dessins au fusain, prolongés dans un atelier recouvert de traces de peinture.
Elisabeth Lebovici, Le beau vice, 13 juin 2019
EN
In the 1990s, Joyce Pensato's arrival in Paris was always heralded as a kind of grunge tornado. Staying with Anne de Villepoix (who was also the first to exhibit her work), she would head to the gallery with her grimacing figures, which included Mickey Mouse, Felix the Cat, Homer Simpson, and [This is Not] Groucho Marx, as well as Batman and Donald Duck. She would even redo them on the spot.
For Pensato, these figures from popular culture and animated films never constituted, as is supposed of canonical American pop art, a way of distancing herself from the world of gesturality. On the contrary, it was more a way of mixing the two, with a rebellious and corrosive spirit. Her thing was more about hurting both. Her technique consisted of forcefully deriving smudges, erasures, and blurry halos from the “arm and shoulder movements” executed in painting by Joan Mitchell (whom Joyce Pensato knew well) or Franz Kline; in other words, to put the body at the service of drawing American comic book and cartoon characters, but to alter them, to better force them into the thickness of the paper, canvas, or wall.
With Joyce Pensato, one always had the feeling that the frenzy apparent in her paintings and drawings, created by a linear accumulation of layers and removals of dark and white enamel paint (more recently color), spilling over in a manner of speaking into repeated attempts at erasure, encompassed her very person. One could just as easily say the opposite, that Joyce Pensato was [in] her paintings and charcoal drawings, extended in a studio covered with traces of paint.
Elisabeth Lebovici, Le beau vice, 13 juin 2019