Suite de quatre huiles sur toiles
Dans des cadres en bois sculpté et doré, travail du XVIIe siècle
Allegories of the Four elements, set of four canvas, attr. to J. van Winghe
44.88 x 58.66 in.
Château de Bagnols depuis le XVIIe siècle ;
Vente anonyme ; Paris, Hôtel Drouot, Me Aguttes, 6 décembre 2013, n°20 ;
Acquis lors de cette vente par les actuels propriétaires
Trois scènes de marché et un intérieur de cuisine appartiennent à cette série représentant les quatre éléments : l’étal de volailles symbolise l’air, l’étal de poissons l’eau, l’étal de fruits et légumes renvoie à la terre et la scène de cuisine au feu. Ces œuvres dynamiques figurant des personnages aux regards malicieux portent une connotation érotique à peine dissimulée : le poulet brandi sur le marché aux volailles est un motif érotique couramment représenté aux XVIe et XVIIe siècles puisqu’il fait référence au verbe « birding » qui signifie « faire l’amour ».
La source de ces quatre compositions est sans doute à chercher chez l’Anversois Joachim Beuckelaer (1533-1574) qui réalise une série monumentale sur le thème des quatre éléments aujourd’hui conservée à la National Gallery de Londres1. Plusieurs motifs sont empruntés à Beuckelaer comme le personnage central féminin représenté sur la toile figurant la cuisine qui semble s’inspirer du Marché aux poissons conservé au musée des Beaux-Arts d’Anvers2. Le bras tendu de la jeune femme tenant un panier semble également être un motif puisé dans le vocabulaire de Beuckelaer. D’autres versions de nos compositions nous sont connues : les scènes du marché aux volailles et de la cuisine figuraient en paire dans la collection J. Herbrand à Paris en 1941 puis chez Artur Ramon à Barcelone en 1990. Récemment, une reprise de la composition du marché aux légumes fut présentée par Christie’s3. Enfin, une série de dessins conservée au musée Boijmans van Beuningen de Rotterdam reprennent nos compositions4. Trois de ces dessins portent les traces d’un dessin sous-jacent à la craie noire. Aussi, il est possible que ces dessins aient été conçus comme modèles servant à produire des gravures, même si les estampes n’ont pas été retrouvées à ce jour. Si cette iconographie remporta un important succès, le modèle princeps reste à identifier. Au début du XVIIe siècle, des artistes comme Jeremias van Winghe s’emparèrent de cette iconographie héritée de Joachim Beuckelaer et de Pieter Aertsen produisant à leur tour des scènes de marché aux détails pittoresques5. L’importance de notre ensemble réside dans son caractère complet : sous nos yeux sont représentés la totalité des éléments, reflets des richesses du monde.
1. N° d’inventaire : NG6585 à NG6588.
2. n° d’inventaire : 814, signé ‘1574/joachi/beu’.
3. Vente anonyme ; Paris, Christie's, 14 juin 2024, n° 120, autrefois dans la collection de Madame de la Boutresse, château de Grosmenil, Saint-Romain-de-Colbosc.
4. N° d’inventaire : N 169, N 166, N 168, N 167.
5. Voir par exemple : Francfort, Historisches Museum, inv. n° B 1792.