Dans un cadre en bois naturel richement sculpté de branchages fleuris
Two studies of female nudes for 'Venus Concordia', black pencil and white highlights on paper, by E. Burne-Jones
14.17 x 10.23 in.
Munich, collection particulière ;
Galerie Michel Descours, Paris et Lyon ;
Acquis auprès de cette dernier par l'actuel propriétaire ;
Collection particulière, Paris
Le subtil dessin que nous présentons compte parmi les études les plus raffinées qu’Edward Burne-Jones consacra aux figures féminines pour Venus Concordia (fig. 1), l’un de ses sujets fétiches où il exalte l’idéal harmonieux et pacificateur de la beauté. Sur une feuille soigneusement préparée d’un lavis de sanguine, l’artiste juxtapose deux poses complémentaires d’un même modèle : l’une de face légèrement déhanchée, l’autre de dos, dans un retournement gracieux qui peint le corps comme une architecture souple et vivante. Tout en s’inspirant librement de la pose des Trois grâces antiques, Burne-Jones reste fidèle à son esthétique préraphaélite où se mêlent à l’héritage de la Renaissance une certaine idéalisation. Il s’attache ainsi ici à un modelé délicat, construit par un réseau de hachures légères qui enveloppent le corps d’une lumière douce. La figure de face incline la tête dans une attitude méditative ; ses épaules rondes, son torse subtilement vrillé et l’élan souple de ses jambes rappellent les silhouettes élancées des fresques italiennes qu’admirait le peintre. La figure de dos, quant à elle, révèle la science anatomique de Burne-Jones : les omoplates, la colonne légèrement incurvée, le galbe des hanches sont rendus avec une précision retenue, toujours au service de son idéal de beauté éloigné de tout réalisme froid. Les rehauts de blanc, appliqués avec parcimonie sur les zones de lumière — clavicule, épaule, courbe des reins — confèrent à la feuille un relief subtil, comme si les corps émergeaient d’une pénombre rosée. Le choix du papier teinté, typique du travail d’étude de Burne-Jones, crée un halo uniforme dans lequel les formes se détachent avec douceur, accentuant la dimension intemporelle et quasi mystique de ces figures. Par cette double étude, l’artiste parvient à condenser ce qui fait la singularité de son art : une recherche de perfection formelle, une élégance mélancolique et un sens aigu de la poésie silencieuse du corps. Il ne s’agit pas d’une simple étude anatomique, mais bien d’une méditation visuelle sur la féminité idéalisée, prélude aux compositions plus ambitieuses où Burne-Jones invita ses modèles à incarner des allégories antiques et spirituelles. Ces deux figures, jumelles et complémentaires, offrent ainsi un rare témoignage du lent travail préparatoire par lequel le maître façonnait ses visions, entre rigueur du dessin et souffle intérieur.
Fig. 1 : Venus Concordia, huile sur toile (127 x 208 cm), Plymouth City Museum and Art Gallery (n° PLYMG.1926.16).